mercredi 22 juin 2016


MAGOUILLES CONSTITUTIONNELLES

La Constitution est un ensemble de textes juridiques qui définit les différentes institutions composant l’État et qui organise leurs relations. Une Constitution écrite est généralement organisée en plusieurs parties appelées titres. Ces titres sont divisés en articles et alinéas. Elle peut comporter également une charte des droits fondamentaux. Quelle que soit sa présentation et son contenu, la Constitution est considérée comme la règle la plus élevée de l’ordre juridique de chaque pays. C’est la loi fondamentale d’un pays et suivant la hiérarchie des normes, elle est au-dessus de toutes les lois internes.

2- La constitution est-elle révisable?

En principe, la constitution est révisable car elle peut être caduque en fonction du temps. Il y a également des besoins qui signalent l’urgence de réviser. Prenons l’exemple de certaines constitutions  en Afrique, qui excluent une frange de la jeunesse. À moins de 40 ans, il n’est pas permis de briguer la magistrature suprême.

3- Le Cas des États- Unis

Elle s'applique depuis le 04 mars 1789, elle a aussi subi plusieurs amendements, vingt-sept au total. Elle est aussi  l'une des plus anciennes constitutions écrites, au monde.
4 -Le Cas du Mali
Le projet de révision proposé par l’ancien président Amadou Toumani Touré qui fait référence à la CHARTE DE KOUROUKANFUGAN  ou la charte du Mandé de l’empire du Mali (sous Soundiata Keïta). Il a été adopté à l’assemblée nationale du Mali.

B-Qui peut réviser  la constitution?

Toutes les Constitutions prévoient les modalités selon lesquelles elles peuvent être modifiées : on parle de procédure de révision constitutionnelle.

1-Peut-on modifier une constitution?
Il peut s’agir de corriger des imperfections ou de modifier des règles de fonctionnement du régime. Cette procédure peut être plus ou moins complexe. 

  2-L’article 89 de la constitution française

« L'initiative de la révision constitutionnelle  appartient concurremment   au Président de la République sur proposition du Premier ministre et aux membres du Parlement. Le projet  de révision doit être examiné dans les conditions de délai fixées au troisième alinéa de l'article 42 et voté par les deux assemblées en termes identiques. La révision est définitive après avoir été approuvée par un référendum. Toutefois, le projet de révision n'est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement convoqué en Congrès ; dans ce cas, le projet de révision n'est approuvé que s'il réunit la majorité des trois cinquièmes  des suffrages exprimés. Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité territoriale. La forme républicaine du Gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision. 


1-      La constitution malienne en son article 118

L'initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et aux députés. Le projet ou la proposition de révision doit être voté par l'Assemblée Nationale à la majorité des deux tiers de ses membres. La révision n'est définitive qu'après avoir été approuvée par référendum. Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire. La forme républicaine et la laïcité de l'État ainsi que le multipartisme ne peuvent faire l'objet de révision.

II) L’INSTRUMENTALISATION DE LA CONSTITUTION : UNE STRATÉGIE POUR S’ÉTERNISER AU POUVOIR

La magouille constitutionnelle peut être comprise comme le fait qu’un dirigeant élu sur la base d’une constitution modifie les dispositions de celle-ci par tous les moyens possibles contre la volonté d’une majorité de population aux fins de se maintenir au pouvoir.  Généralement, la révision tourne autour du statut du chef de l’État, de l’alternance politique.


A- L’avènement de la démocratie africaine à la fin de la guerre froide

Le discours de François Mitterrand à la Baule le 20 juin 1990 à la fin de la guerre froide fut  un déclencheur d’un démarrage de la démocratie sur le continent africain, en dehors du Bénin dirigé par le général Mathieu Kérékou qui a anticipé cette initiative et organisé sa conférence des forces vives de la nation en février 1990 pour s’engager résolument sur la voie de la démocratie. Les autres ex-colonies françaises comme le Mali et le Niger ont suivi le pas.
Beaucoup de pays dirigés par des dictateurs ont résisté à cette vague de conférences avec parfois la complicité de la France qui n’était pas convaincue de la nécessité de laisser se démocratiser les anciennes colonies. L’emprise de la France-Afrique, surtout pendant la présidence de Chirac a ralenti, puis paralysé le processus global de démocratisation entre 1995 et 2002.  
Depuis 1990, dans l’ensemble des 20 ex-colonies, la démocratie a globalement progressé mais très lentement et aux prix de luttes difficiles. Le nombre de pays débarrassés des présidents inamovibles mis en place par le pouvoir français a fini par augmenter.
Dans 5 pays sur 20 en 2014, les présidents se sont correctement fait élire : le Mali, le Bénin, les Comores, le Sénégal et le Niger. En moyenne 8 dictateurs s’y opposent. Si la monarchie marocaine et l’Algérie du FLN sont en dehors d’un schéma classique d’influence française, dans les 5 autres pays, Côte-d’Ivoire, Centrafrique, Guinée Conakry, Tunisie, et Madagascar, la situation est plus complexe et  instable en raison d’une guerre ou d’une transition démocratique non achevée. Ces 8 dictatures sont le Tchad, Congo-Brazzaville, Cameroun, Djibouti, Togo, Mauritanie, Gabon et Burkina Faso. Après les 41 ans de règne de son père, Ali Bongo, 55 ans, depuis 5 ans aux commandes, a imposé au Gabon une succession quasi-monarchique au travers d’un coup d’état électoral en 2009.
Mohamed Ould Abdel Aziz, 58 ans, n’a que 6 ans de pouvoir depuis 2008, mais il a très rapidement rejoint le schéma classique des dictatures protégées par Paris par son arrivée dans un coup d’état suivi de 3 mascarades électorales. Faure Gnassingbé, 49 ans, n’a que 10 ans de règne, mais il a acquis le pouvoir par un coup d’état sanglant, lui permettant de succéder à son père, 38 ans en place, et, il possède lui aussi à son palmarès déjà 3 mascarades électorales significatives.

Ismaïl Omar Guelleh, 68 ans, arrivé en 1999, est là depuis 16 ans. Idriss Déby Itno, 63 ans, est en place depuis 1990, depuis 25 ans. Le tombeur de Thomas Sankara en 1987, Blaise Compaoré, 64 ans, atteint les 28 ans de pouvoir avant d’être chassé par une révolte populaire. Sassou Nguesso, 72 ans, a accumulé en deux périodes 31 ans de présidence. Le doyen, Paul Biya, 82 ans, règne depuis 1982, soit depuis 33 ans.
La méthode est simple pour ces dictateurs. Une fois passé l’étape de l’instauration du multipartisme dans les années 90, ils ont acquis les techniques de fraudes pour rester en place contre l’avis des populations. Finalement, ils refusent de quitter le pouvoir de peur d’être poursuivis par la justice. 

B- Exemples de magouilles constitutionnelles en Afrique


1-      Au Tchad,

 la constitution du Tchad a été modifiée en 2005 et a permis à Idriss Deby Itno de se maintenir au pouvoir depuis son coup d’État en 1990.


2-      Au Burkina Faso,

 par un subtil jeu de levée de la limitation de mandats en 1997, puis de restauration de cette limitation en 2000, Blaise Comparé reste au pouvoir depuis son coup d’État en 1987.

3-      Au Togo,

la constitution a été modifiée en 2003 par feu EYADEMA qui s’est  fait réélire pour un troisième mandat de cinq ans, au terme de 36 ans de pouvoir jusqu’à sa mort en 2OO5.


4-      En Ouganda,

La constitution a été modifiée en 2005 et YOWERI Museveni  est resté au pouvoir depuis sa victoire militaire contre le régime en place en 1986.
Malgré ces nombreux cas qui se sont déjà produits l’Afrique reste agitée par des mouvements  et des contre mouvements qui sont à l’œuvre dans plusieurs pays dont les dirigeants sont au terme de leur deuxième et dernier mandat

5-      Au Bénin,

le président Boni Yayi, élu en 2006 puis réélu en 2011 fait une promesse selon laquelle il ne se présentera pas à un troisième mandat en 2016. La Constitution ne le lui permet pas et la Commission des lois du Parlement béninois non plus. Pourtant il y a quelques mois, son gouvernement a déposé un projet de réforme constitutionnelle qui finalement a été rejeté par le parlement. Un projet qui ne concernait pourtant ni le nombre ou la durée des mandats, mais qui plaidait pour la création d’une Cour des comptes. L’opposition soupçonne pourtant le président béninois Boni Yayi de vouloir faire amender la Constitution pour ensuite évoquer le changement de république afin de préparer le terrain pour la prochaine présidentielle.


III) LE RÉVEIL CITOYEN : EXEMPLES DU BÉNIN ET DU SÉNÉGAL


1-      Au BENIN
2011: le débat de la révision constitutionnelle est relancé au Bénin après réélection sur fond de contestations de Boni Yayi
Par décret N°2013- 255 du 6 Juin 2013, un projet de Loi portant révision de la Constitution du 11 Décembre 1990 a été déposé à l’Assemblée Nationale par le Gouvernement du Boni Yayi

2011 à ce jour : l’actualité politique est donc agitée par des déclarations pour, des déclarations contre; des marches pour (souvent autorisées) ; des marches contre, interdites, des affiches
2-      Au SÉNÉGAL
 2011 à 2012 : Le groupe s’est battu foncièrement contre l’ambition révisionniste d’Abdoulaye Wade pour s’éterniser au pouvoir après 2012. Tout au long de l'année 2011, ils organisent des manifestations, « foires aux problèmes » et des sit-in sur la place de l'Obélisque à Dakar.
Le 15 février 2012, le gouvernement interdit ces manifestations. Le lendemain  16 février, trois membres du collectif sont arrêtés pour avoir participé à une manifestation interdite sur place de l'Obélisque.

IV) CONCLUSION.
Les tentatives de magouilles constitutionnelles provoquent souvent des soulèvements populaires avec leurs corollaires de morts d’hommes, d’assassinats politiques, de réfugiés, etc. Les effets entraînés peuvent être d’ordre économique tandis que les conséquences peuvent être d’ordre politique (par exemple la sanction politique récente infligée à tous les pro-révisionnistes sous le règne de Blaise Compaoré). Ils ne pourront pas se présenter aux prochaines élections au Burkina Faso.







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